Un article rédigé par Alain Lefebvre - janvier 2014
Il est temps désormais de parler d’Assetto Corsa comme j’avais promis de le faire après le rapide petit texte que j’avais rédigé juste après la sortie de la toute première bêta.
Justement, en relisant ce petit texte, et c’est toujours utile de se relire ne serait-ce que pour se remettre dans le contexte… En me relisant donc, je m’aperçois des progrès réalisés par Kunos sur Assetto Corsa en seulement quelques semaines.
Lors de ma première revue, je critiquais la fluidité de l’affichage, les sons, et le retour de forces. Il est très encourageant de constater que tous ces aspects ont largement progressé depuis jusqu’à devenir des points forts de cette simulation. Et tout cela en seulement quelques semaines.
Bien évidemment, il reste encore beaucoup à faire : la première mouture équipée des adversaires IA est encore très perfectible car les robots n’ont apparemment pas le souci d’essayer de vous éviter. Donc, bien sûr, on se fait sortir assez vite. Mais les évolutions précédentes permettent d’avoir confiance sur les évolutions futures et on peut être raisonnablement certain que ce défaut va être corrigé assez vite.
Certaines voitures sont très excitantes à conduire alors que d’autres le sont beaucoup moins. Pour autant que je puisse en juger les tracés sont très bien reproduits et les effets de lumières et d’ombres ajoute encore au réalisme. Piloter une Ferrari 599 à Monza, par exemple, est une expérience très prenante.
Alors c’est fait, la messe est-elle dite, Assetto Corsa est-il déjà le futur standard ?
Pas tout à fait car il y a un point très important sur lequel cette simulation me paraît encore un peu en difficulté. Il s’agit de la facilité de pilotage. Les ayatollahs de la simulation imaginent toujours que le réalisme doit se confondre avec difficulté mais mon expérience me permet d’affirmer que ça n’est pas forcément le cas. Conduire une voiture de course sur un vrai circuit n’est pas très difficile en fait, à partir du moment où vous savez -à peu près- piloter. En revanche, ce qui est réellement difficile, c’est d’arriver à aller vite tout en restant sur la piste. C’est seulement quand on pousse la voiture dans ses derniers retranchements, quand on cherche à atteindre la limite que les choses doivent devenir compliquées, difficiles et se révèlent être un vrai défi qu’on aura plaisir à relever.
C’est là que réside la vraie difficulté des simulations modernes et, pour le moment, personne n’arrive à proposer une solution qui soit complètement satisfaisante sur ce point précis.
Pour revenir sur Assetto Corsa, c’est selon moi ici même que la différence se fait. Pour le moment, la plage de conduite proposée par cette simulation est encore trop étroite et, du coup, il est vraiment difficile d’attaquer sans se sortir.
Comprenez-moi bien, il est important de voir ses erreurs effectivement pénalisées. Si on exagère, si on pousse trop, c’est normal de se retrouver dans le bac à graviers. Mais justement, dans le cadre d’Assetto Corsa, la marge d’erreur est beaucoup trop fine selon moi.
Pour bien me faire comprendre prenons l’exemple inverse… Avec PCARS, c’est le contraire : il faut vraiment exagérer pour se sortir (encore que, ça dépend des voitures). Le lecteur astucieux aura deviné tout seul que la bonne mesure devrait se situer entre ces deux extrêmes.
C’est sans doute pour cette raison que Game Stock Cars 2013 est souvent mis en avant comme une des meilleures simulations modernes disponible aujourd’hui. Et effectivement, Je partage cet avis car Game Stock Cars 2013 permet d’attaquer, de sentir la limite, de comprendre pourquoi on s’est sorti et d’admettre qu’effectivement, c’est bien de notre faute (j’ai exagéré ou j’ai fait une faute, je suis puni, normal).
Tout aussi important, peut-être, est la capacité à rattraper la voiture quand elle décroche, quand on a atteint cette fameuse limite. Là encore, votre jugement va beaucoup dépendre de votre appréciation de ce qui est réaliste et de ce qui ne l’est pas. Bien entendu, le contexte ici est très important : les voitures anciennes glissaient assez volontiers (angle de dérive important, jusqu’à 15°) et donc acceptaient relativement facilement d’être rattrapées avec le coup de volant adéquat. Les voitures modernes qui ont beaucoup d’appuis sont beaucoup moins permissives : la marge d’erreur est plus faible (angle de dérive typiquement de moins de 5°), le décrochage définitif est plus rapide, il est aussi brutal. Il est donc normal qu’une monoplace moderne ne se rattrape pas aussi facilement qu’une GT des années quatre-vingt (plus lourde et qui présente bien plus d’inertie). Ceci dit, même en tenant compte de ces différents contextes, toutes les simulations ne sont pas logées à la même enseigne.
Encore une fois, je suis plutôt dubitatif sur ce point avec Assetto Corsa : quand la voiture commence à décrocher, le plus souvent c’est terminé ; rien à faire pour la rattraper et essayer aggrave même votre cas !
Pourtant, malgré ces réserves importantes, je suis optimiste quant à la place que cette simulation va se faire sur le marché.
Dans le titre de cette chronique j’évoque qu’une surprise, une bonne surprise, est toujours possible. Et c’est justement de cela que je voudrais vous entretenir maintenant. Cela fait un bon moment que je n’évoque plus trop iRacing dans mes écrits. Je dois dire que j’étais de plus en plus critique vis-à-vis de cette simulation au point que je commençais à penser qu’elle avait perdu sa voie : le retour de force (jadis un gros point fort de ce titre) était devenu bizarre, les voitures (toujours plus nombreuses) affichaient un comportement douteux (éventuellement compréhensibles pour les nouvelles mais plus inquiétant pour les anciennes qui voyaient leur comportement se dégrader) et ainsi de suite.
Bref, il semblait bien qu’iRacing s’était fourvoyé dans une impasse. Dommage car, en dehors des défauts propres à ce titre (et là, inévitablement, on entend un « c’est iRacket qu’il faut l’appeler ! »), cette simulation était tout de même devenu une plateforme importante (par sa popularité) pour les courses onlines. Et puis, miracle, la RUF est arrivée !
Oui, vraiment, la toute dernière voiture disponible sur iRacing change tout et dans le bon sens. Je n’y croyais pas au départ mais j’étais résolu à essayer, au cas où (voyez jusqu’où va mon dévouement pour le Simracing !)… Et je dois dire que je ne suis pas encore revenu de ma -bonne- surprise : voilà enfin une voiture pré-vi-si-ble comme elles devraient toute l’être.
Et là, je peux en parler en connaissance de cause : j’ai testé une 911 GT3 RS lors de l’été dernier à Dijon-Prenois (lors d’un « track day » que je relate sur mon blog à http://www.alain-lefebvre.com/?p=1848) et là, au volant de la RUF sur iRacing, je retrouve quasiment exactement les sensations éprouvées avec la GT3 RS… C’est bon signe. Même le son est fidèle, on retrouve cette sonorité tout à la fois profonde et métallique propre au flat six qu’on reconnaît immédiatement quand on y est habitué.
La RUF d’iRacing illustre d’une façon saisissante la différence qu’il y a entre les trois stades : 1-piloter normalement (très facile), 2-attaquer raisonnablement (c’est-à-dire sans se traîner mais sans chercher la limite non plus, pas trop difficile) et 3-attaquer franchement (là, on cherche à atteindre la limite et, normalement, les choses se corse !). Toutes les simulations permettent de reproduire le stade 1 mais c’est souvent l’écart entre le stade 2 et le stade 3 où ça coince : trop grand dans quelques cas (PCARS par exemple) ou trop étroit le plus souvent (comme dans Assetto Corsa). C’est finalement super-rare d’avoir une simulation qui permette d’avoir les trois stades vraiment différents (et, jusqu’à présent je ne versais que rFactor2 et GSC dans cette classe).
Et là, avec iRacing, le compromis est vraiment idéal : on peut se balader sur la piste comme si on montrait le circuit à un passager, on peut « rouler pour durer mais sans se traîner » ou « attaquer comme un malade » pour voir où est la limite de la voiture sur ce tracé. Et, à chaque fois, la voiture répond présent avec un comportement réaliste.
Du coup, j’ai eu envie de participer à une course sur iRacing ce qui ne m’était pas arrivé depuis un an!
J’ai donc rejoint la foule des grands jours pour la désormais traditionnelle course annuelle des 2H40 de Daytona (en « miroir » des 24H00 de Daytona qui avaient lieu ce même WE). J’ai été éliminé assez vite de ma première tentative (percuté au 8ème tour alors que j’étais remonté de la 15ème place sur la grille à la 4ème place de ma catégorie mais il est à noter que le responsable de mon abandon s’est excusé par un message privé dès le lendemain… Assez rare pour être souligné). Je tente donc ma chance une nouvelle fois dans la course du lendemain (plus de 1000 inscrits à cette session !). Cette fois, je passe sans problème le cap des dix premiers tours et je me mets en mode « cruise » jusqu’au premier ravitaillement. Une fois passé cette première grosse étape, les choses sont claires : les Riley DP qui restent en course sont rares et je suis « installé » dans les dix premiers de la catégorie RUF sans trop de difficultés. Il suffit désormais de rallier l’arrivée pour conclure cette course de la bonne façon. Mais je perds un peu de temps lors du second ravitaillement et je me retrouve 15 secondes derrière Robert Bourlet (un Canadien, ça ne s’invente pas comme nom !) alors que ce brave Robert était assez loin derrière moi avant l’arrêt aux stands… Et, effectivement, je remonte sur lui assez facilement, le tracé est désormais assez dégagé et les DP qui roulent encore sont prudentes (dans cette catégorie, les jeux sont faits depuis un moment). Lorsqu’enfin j’arrive à rejoindre Robert, je perds la voiture au raccordement (classique !). J’ai été trop gourmand trop tôt et tout est à refaire. Il semble que ce brave Robert ne se souci pas de moi car son rythme ne varie pas, même quand je me rapproche. La course se déroule de nuit mais l’ambiance générale est assez claire pour que ça ne soit pas gênant. Bon, me voilà de nouveau à portée de Robert et je reste derrière lui deux tours pour bien observer où le passer. Car le bougre a du métier : il roule bien et me ferme la porte juste ce qu’il faut pour me gêner sans se ralentir…
Je décide de porter mon attaque au virage dit « du fer à cheval » (celui avant le raccordement) et… Loupé, Robert ne m’a pas laissé assez de place et j’ai le choix entre le percuter ou me mettre en tête à queue… Je choisis évidemment la seconde solution et, heureusement, ma figure se termine sans dommage. Mais l’espoir de conquérir la 6ème place s’est définitivement envolé.
Je termine donc 9ème au général et 7ème des RUF avec 79 tours parcourus (144 minutes de course), une bonne chose de faite !
Le comportement « miraculeux » de la RUF m’étonne tout de même un peu et, en lisant les notes de la dernière mise à jour, je m’aperçois que la voiture allemande a bénéficié de la 5ème génération (toute récente) du nouveau modèle de pneus, la fameuse évolution avec laquelle iRacing se débat depuis des mois… En testant aussi la McLaren (qui vient également de recevoir cette 5ème génération) je me rends compte que le comportement de l’anglaise s’est considérablement amélioré également. Il semble donc que l’équipe technique d’iRacing ait enfin mis le doigt sur la bonne version de ce NTM (new tyres model) si décrié…
Si cela se confirme, il faudra bien admettre qu’iRacing revient ainsi complètement au premier plan.
Finissons sur une note optimiste : le retournement de situation qui semble toucher iRacing peut aussi arriver à d’autres : peut-être que les prochains mois vont nous permettre de voir des progrès décisifs dans l’optimisation de rFactor2. Le nouveau titre phare d’ISI deviendrait ainsi la plateforme de modding de référence comme l’était rFactor premier du nom. Et pour évoquer ce dernier, peut-être même que le mod GTPC par VirtuaLM Junior Team va être enfin mis à notre disposition… Quoi, on peut rêver non ?
Illustrations : www.teamvvv.com & iRacing.com
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