Un article rédigé par Alain Lefebvre - septembre 2013
Tout d’abord, une petite mise au point : ce récit ne vous est pas proposé pour frimer puisque, si frime il devait y avoir, c’est en ligue que nous ferions nos courses de longue haleine (mais ça va trop vite en ligue !). Ensuite, pour répondre à la question induite : pourquoi roules-tu dans ton coin au lien d’aller online et faire "profiter de ta présence" les autres ?
Hum, bonne question. 1- rouler offline permet de régler le niveau au % près et c’est bien utile quand on veut garder une chance de gagner (faut bien que je motive mon fils !). 2- je ne connais pas de course de 24H00 online (mais je ne demande qu’à connaître !). 3- rouler offline ça veut dire aussi rouler quand on veut et, vu les contraintes à satisfaire, on comprend que les courses de 24H00 ne soient pas légion… Ceci étant dit, voyons maintenant ce petit récit que je vous propose aujourd’hui en guise de chronique.
Commençons par la première question : pourquoi, oui pourquoi vouloir à tout prix disputer des courses d’endurance avec rFactor (et de 24H00 en plus !) ?
Eh bien, c’est difficile à expliquer, il faut le vivre en fait… Dans un sport éminemment individuel, on retrouve une dimension "équipe" qui est bien agréable à condition d’apprécier son ou ses équipiers, bien sûr !
En plus, quand il s’agit du Mans, la fameuse "magie du Mans" n’est pas une légende et vous en apercevez vite, même en simulation…
Du coup, faire des courses d’endurance (virtuelle) avec mon fils Val est devenu une petite tradition entre nous… Notre première tentative remonte à août 2009 où nous avions bouclé notre premières 24H00 du Mans ensemble (en équipage à deux !). Je raconte cela sur mon blog à http://www.alain-lefebvre.com/?p=260
Ensuite, excités par l’expérience mais frustrés par le résultat (nous voulions non seulement terminer mais aussi et surtout gagner !), nous avons remis cela en juin 2010 mais, cette fois, en équipage à trois pour que cela soit moins pénible. Mais, hélas, le Mans s’est montré cruel puisque nous avons été obligés d’abandonner peu après la mi-course (récit ici http://www.alain-lefebvre.com/?p=522).
Depuis, nous tentions vainement de boucler de nouveau 24H00 ensemble mais nos différentes tentatives ont toutes été contrariées par différentes causes. Alors, cette fois, nous étions particulièrement motivés pour y arriver enfin : terminer (de nouveau) et gagner (at last !).
Abordons maintenant la question du "comment ?"… Tout d’abord, il me fallait trouver une mod qui convienne à Val qui, en devenant grand, devient aussi de plus en plus difficile : inutile de lui proposer de rouler au volant d’une "vintage" de mon goût, il lui faut du moderne, de l’agressif et du "collé par terre" sinon, il ne participe pas… J’ai essayé diverses mods mais rien ne collait : soit c’est lui qui n’en voulait pas, soit c’est moi qui m’apercevais d’un défaut rédhibitoire (comme des IA débiles impossibles à corriger, trop fréquent sur rFactor, hélas…). Je commençais à me décourager lorsque je suis tombé, plus ou moins par hasard sur une mod qui fait partie de "l’underground" du Simracing : le Mans 1977, convertit par des Espagnols à partir d’une autre mod développée pour GTR2 (si j’ai bien compris !), voir à http://3dblackedition.blogspot.com.es/p/le-mans-1977_5.html
Alors, je parle ici "d’underground" du Simracing quand il s’agit de contenus que jamais les sites "légalistes" n’iront mettre en avant, ni même les mentionner. Il s’agit de cette frange des mods qui n’ont pas reçu les autorisations des auteurs avant conversion, ce genre de chose…
Les "légalistes" ne veulent pas entendre parler de ces mods-là mais je n’ai pas ce genre de prévention : je pense même qu’il n’y a aucune mod qui soit vraiment légale. L’affaire récente entre Enduracers et Porsche le prouve assez, à mon avis. Bref, je suis donc partie de cette mod "Le Mans 1977" qui souffre de quelques défauts mais qui présente aussi d’importantes et d’intéressantes qualités…
Voyons d’abord les défauts : moche et pas réaliste. Voilà qui devrait suffire à l’enterrer définitivement mais, dans mon cas, ça s’est avéré être plutôt utile… Comme cela ?
Eh bien, le côté "moche" (n’exagérons rien, ce n’est pas aussi léché qu’Enduracers, par exemple mais il ne s’agit pas non plus de "boîtes" vaguement peintes) fait qu’il est facile de charger tout le plateau (56 voitures !) tout en gardant un bon niveau de fluidité. Et c’est aussi une garantie que le PC ne va pas planter au milieu de la nuit quand la mémoire saturée finira par crier "pouce". Donc, plutôt un bon point en fait. Mais, le côté "pas réaliste", comment peux-tu accepter cela, toi ?
D’abord, sur le plan graphique (même s’il ne s’agit pas du top niveau), le plateau des 24H00 du Mans 1977 est représenté avec une grande exactitude (j’ai pu le vérifier grâce au livre de Christian Moity, Jean-Marc Teissedre et Alain Bienvenu (en deux volumes, voir à http://www.amazon.fr/24-heures-Mans-1923-1992-tomes/dp/2909413063/ref=sr_1_9?s=books&ie=UTF8&qid=1379856867&sr=1-9&keywords=24+heures+du+mans). Ensuite, sur le plan du comportement, il est clair que les voitures vont trop vite (trop d’adhérence et sans doute même trop de puissance moteur) et qu’il faudrait les ralentir d’au moins 10 à 20 secondes au tour !
Mais alors, avec des voitures représentatives des performances de 1977, Val n’en voudrait pas… Alors que là, l’Alpine A442 lui a plu tout de suite !
Donc, ces défauts repoussants pour beaucoup sont devenus des arguments valables dans mon cas et je n’ai pas fait le difficile. D’autant qu’il faut que je parle des qualités maintenant…
Et j’ai constaté que les IA se comportaient vraiment bien (même de façon assez surprenant pour une mod sous rFactor). Or, le bon comportement des IA est vraiment clé dans une course d’endurance où on passe une grande partie de son temps à gérer le trafic. Et là, à part le côté folklorique de quelques voitures (en particulier de quelques Porsche 911 et 934) qui s’obstinaient à tenter de rouler sur deux roues après avoir escaladé les vibreurs (je vous laisse imaginer le cocasse de certaines scènes), ça devenait un gros plus.
L’autre grande qualité, c’est le comportement des voitures. L’Alpine qu’on avait choisie (tant qu’à réécrire l’histoire, autant essayer de triompher des Porsches dans cette édition 77 qui est restée, avec raison, dans les mémoires !) était super-agréable à piloter. Surtout, ses glissades à basses vitesses étaient faciles à rattraper ce qui est un atout important dans l’idée d’éviter de frotter les rails trop souvent…
J’ai juste eu à améliorer la fiabilité de l’ensemble car cette mod est bien trop fragile pour affronter les courses de 24H00 dans son état d’origine : les premières simulations effectuées me montraient qu’il n’y avait plus personne de valide au bout de quelques heures !
Mais ça, c’était facile à corriger alors que de revoir le comportement des IA, c’est une autre histoire.
Bien entendu, j’aurais volontiers préféré la mod GTPC qui va bientôt sortir (on l’espère) et qui promet beaucoup (on y croit) mais j’ai suffisamment d’années de Simracing derrière moi pour savoir
qu’il ne faut pas attendre une sortie de mod ou de simulation pour profiter des occasions de se faire plaisir et les possibilités de coincer 24H00 sont rares aussi bien pour Val que pour moi (TAF
à gérer…).
Ensuite, il fallait choisir le circuit. Facile me direz-vous, il y a justement une version "1977" du tracé du Mans par VirtuaLM, que demandez de plus ?
Oui, c’est vrai et pourtant, ce n’est pas cette version que j’ai retenue finalement mais plutôt la version 1991 des mêmes VirtuaLM. Pourquoi encore une entorse au réalisme ? Vu les performances
des voitures, le tracé 91 me semblait plus adapté et, surtout, j’avais peur que l’on s’ennuie lors de l’interminable ligne droite d’avant les chicanes. Or, de l’ennui à la déconcentration, il n’y
a vraiment qu’un pas.
Donc, nous étions prêts et nous nous sommes donc lancés. Une fois de plus à deux car notre camarade de jeu habituel (Nicolas Rolin) n’était pas disponible cette fois. Et vouloir réunir toutes les
conditions, c’est se mettre dans la situation de ne jamais rien faire.
On a tiré à "pile ou face" qui prenait le départ et c’est Val que le sort a désigné. Il fit aussi les qualifs avec un seul tour lancé en 3’32 nous assurait la 3ème place sur la grille. Bon départ, il prend la tête dès le second tour et enchaine les tours rapides avec régularité. Les simulations d’avant-course que j’avais menées m’avaient conduit à rehausser le niveau des IA jusqu’à 104 % afin que l’opposition ne soit pas symbolique mais sans doute aurais-je pu mettre encore un peu plus car nos premiers relais se déroulent sans qu’on ait le moindre mal à imposer notre rythme.
Nous enchaînons les doubles relais (2x40mn) en ne changeant de pneus qu’à l’occasion des changements de pilote. Nous prenons d’abord un tour d’avance à la Porsche 936 qui campe à la seconde place puis un deuxième avant la tombée de la nuit. À partir de là, l’écart est resté stable.
Nous avons pu traverser la nuit sans encombre, en partie par chance mais aussi parce qu’on s’est bien méfié du trafic, avec raison.
Au retour du matin, tout s’annonçait bien : on était fatigué, certes, mais encore assez en forme pour attaquer la dernière ligne droite (façon de parler) et notre avance, qui n’avait pas varié, semblait solide. Et là, une alerte : la 936 se met à remonter tout du coup !
Alors qu’on avait roulé pratiquement sans la voir, je la retrouve vers 8H00 du matin et je me rends compte que je suis incapable de rester devant. Pire, elle me décroche et s’en va au loin…
Certes, les quelques accrochages et sorties de route qu’on n’a pas réussi à complètement éviter (sans surprise) ont pesé sur l’état de notre voiture qui n’est plus aussi fringante qu’en début de course : on a perdu au moins 10 KM/H en vitesse de pointe mais tout de même, ce réveil de la Porsche blanche est bien inquiétant pour le reste car il reste encore 7H00 de course…
Je fais part de mon inquiétude à Val au moment de lui passer le volant alors que notre marge est tombée de deux à un seul tour d’avance sur le second. Val n’avait pas besoin d’en entendre plus pour se remotiver et il mena son relais tambour battant.
Alors que le record du tour était resté stable depuis les premiers relais (Val l’avait descendu en 3’28.3 en début de soirée et j’avais pu l’améliorer en 3’27.9 ensuite), Val va réussir à le battre quatre fois de suite avec une voiture diminuée !
En l’abaissant finalement en 3’25.6, Val a repris un tour à la Porsche qui semble ensuite se résigner à la situation (bien entendu, il s’agit d’une interprétation abusive due à la qualité de l’immersion dans nos simulation préférées mais, à ce moment-là, cette interprétation me rassurait grandement !). Alors, à 10H00 du matin, la messe était dite (ça tombe bien, on était justement dimanche matin…) ?
Non, ce n’est jamais le cas avec les 24H00 du Mans et c’est justement au moment où vous commencez à penser que "c’est plié" que cette épreuve prend plaisir à vous mordre cruellement… Dans notre cas, tout le drame s’est concentré lors de la dernière heure de course… Tout d’abord, la Porsche a disparu des écrans et notre avance sur le second est passée à 6 tours… Confortable quoi !
Mais, peu après mon tour dernier ravitaillement, alors qu’il restait environ 20mn de course, je sors fort à la chicane Dunlop… Obligé de me traîner pour ramener la voiture sur pratiquement un tour entier du circuit (et encore, bien content de pouvoir ramener la voiture pour la faire réparer !).
Et là, même punition en repartant et au même endroit ! Cette fois-ci, j’ai eu très peur : quand les mauvais coups se succèdent, c’est jamais bon signe…
Jusqu’à ce que je réalise qu’il s’agissait d’une panne de freins. La panne aléatoire préférée de rFactor !
En se traînant vraiment, il était tout de même possible de rallier l’arrivée sans perdre trop de notre précieuse avance…
Heureusement que cette panne n’est arrivée qu’à la fin.
Finalement, nous avons pu franchir l’arrivée en ayant bouclé 394 tours, très contents de cette issue et encore une fois surpris par les trésors cachés de rFactor !
J’ai réalisé une petite vidéo de notre modeste aventure qui résume plus ou moins bien ce que nous avons réussi ensemble : prendre une grosse dose de plaisir pour pas cher !
Merci le simracing…
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