KJEL : Salut Dim. C'est toi qui a eu l'idée de cette
interview avec comme sujet principal, le simracing. C'est également toi qui m'a fait découvrir cette activité que je ne connaissais pas sous ce nom. Alors pour les internautes néophytes qui sont
en train de lire ce billet, peux-tu expliquer concrètement ce qu'est le SimRacing ?
DIM : Salut Kjel, c'est un réel plaisir que de te rencontrer en personne et ce pour la première fois, grâce à cet entretien. Je suis d'autant
plus ravi que c'est toi qui m'a réellement fait découvrir le blogging. Je dois le reconnaître, sans ton accueil, ton soutien, tes encouragements de tous les instants, j'aurais sans doute
abandonné depuis longtemps cette activité et The Racing Line ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui. Je dois beaucoup à ton blog Chez
Kjel !
Ce qu'est le SimRacing ? Il est bien difficile, même pour moi, de répondre de manière exhaustive. Parfois, j'ai l'impression qu'il y a presque autant de définitions que de
SimRacers, mais je vais tout de même m'essayer à l'exercice en donnant ma propre vision de la discipline.
En français, c'est "la simulation des courses automobiles". Cela suppose, selon moi, d'aller au-delà du simple jeu, de franchir un cap vers quelque chose qui nous rapproche un peu, et toujours
plus, du Sport Automobile réel. C'est d'abord par l'utilisation de simulations, tu constateras que je n'ai pas dit "jeux", qui reproduisent le plus fidèlement possible la réalité. C'est l'emploi
de périphériques adaptés comme, au minimum, un ensemble volant et pédalier. C'est aussi, à mon sens, se mesurer aux autres SimRacers qui eux, pour le coup, ne sont pas virtuels.
Cette définition pourrait te paraître stricte, ennuyeuse et finalement pas très engageante... Il faut, malgré tout, raison garder, le SimRacing regroupe l'ensemble des amateurs de courses
automobiles virtuelles, même s'ils se prennent parfois, souvent(?), au sérieux, ils n'en restent pas moins des pilotes de salon en chaussettes (c'est ainsi, qu'ironiquement je nomme les
SimRacers).
Et toi, pourquoi avoir finalement franchi le pas du simple amateur de simulation et as-tu hésité à basculer dans le monde du SimRacing ? Cela a-t-il changé ta vision de la discipline ?
KJEL : Je n'ai pas hésité une seule seconde à basculer dans le simracing pour voir quel était réellement mon niveau par rapport aux autres
personnes réelles, fanas elles-aussi de courses virtuelles. J'ai alors découvert des pilotes très rapides (top pilotes et aliens) que j'aurais probablement qualifiés quelques années plus tôt - et
en toute méconnaissance de cette discipline - de tricheurs. Franchement, grâce à ton blog The Racing Line, j'ai découvert la face
cachée de l'iceberg avec un tas de sites web spécialisés, des communautés, des championnats et des accessoires plus fous les uns que les autres (volants, shifters, sièges, chaussures spéciales
simracing...)
Mais toi, qu'est ce que tu aimes le plus dans le SimRacing ? La course à la victoire et la gloire virtuelle ? Ou bien les duels même si c'est pour la dernière place, ce qu'on
appelle les arsouilles dans le milieu ?
DIM : Ce qui anime la plupart des pilotes réels et virtuels c'est la victoire, ce serait un mensonge que de dire le contraire, et on y pense
toujours un minimum avant de prendre un départ, même si notre position initiale n'est pas favorable. Cependant, sur un tarmac virtuel, nous "jouons" moins notre carrière ou notre réputation que
les pilotes réels. Aujourd'hui, avec la démocratisation de la discipline, la concurrence est devenue importante, féroce, surentraînée et viser une victoire systématique demande un
investissement qui frôle la déraison. Cela peut même s'avérer une expérience extrêmement frustrante à la longue...
Dans le SimRacing, on peut aussi et
simplement prendre plaisir à piloter et apprendre. Ce que je préfère pour ma part, et après presque 15 ans de pratique, c'est l'arsouille de milieu, voire de fin de grille. J'aime aussi, et par
dessus tout, les remontées en condition difficile. N'étant pas très bon dans l'exercice des qualifications ou des départs, j'ai donc souvent l'occasion de prendre du plaisir... Et puis, les
longues arsouilles entre SimRacers "gentlemen" sont sans doute ce qu'il y a de plus sympa en SimRacing même si l'on ne finit pas devant.
KJEL : C'est sûr que je préfère me bagarrer pendant toute la course que d'être leader et m'emmerder du début à la fin ou
alors d'occuper une bonne place mais d'être complètement isolé. Maintenant, obtenir une première place c'est toujours exaltant et je voulais savoir si tu te souvenais de ton premier succès ?
Est-ce que ce fût un moment fort ? Et est-ce que tu es monté très vite sur la première marche du podium ?
DIM : Ma première victoire "officielle", c'était en 2002, 1 an après mes débuts en ligne...
KJEL : Wahou, tu n'as pas traîné ! Vous étiez cinq sur la grille... ? (rires)
DIM : Non... mais sur des courses non officielles je totalise bien plus de victoires et avant cette date. Il est vrai, parfois, c'est au
moment de passer la ligne d'arrivée que je me rendais compte que tout le monde avait quitté le serveur, j'étais donc tout seul (rires). Pour en revenir à celle de 2002, je m'en souviens comme si
c'était hier ! C'était avec Grand Prix Legends, sur le circuit historique de Kyalami. Autant te dire que oui, cela a été un moment très fort, comme à chaque fois du reste, même si cela est de
plus en plus rare pour moi. Le sport en lui-même est virtuel, les succès sont bel et bien réels, même si ce n'est pas reconnu sauf dans le championnat dans lequel on évolue. Je peux te dire que
le cri de joie primaire, ce sentiment de la tâche accomplie, n'est sans doute pas si éloigné de ce que peuvent ressentir les véritables pilotes.
KJEL : Un cri primaire tu dis... oui, ça m'évoque vaguement quelque chose (rires). J'ai exulté plus d'une fois et même pas pour une victoire.
Un dépassement, une pôle, un podium et je suis tout fou.
Dim, un simracer assidu au palmarès conséquent. Kjel est plus dans la catégorie Casual simracer
DIM : En réalité, ce dont je me souviens encore plus, c'est mon premier départ en course officielle contre d'autres mordus comme moi. Encore avec
Grand Prix Legends sur le circuit de Silvertsone, j'avais précédemment réalisé la pôle avec plus d'une seconde d'avance sur le deuxième. C'était fort, très fort ! J'étais tellement tendu,
stressé, crispé, tremblant que je n'ai pas été très loin (rires).
KJEL : Je me souviens également de ma première course et d'ailleurs j'ai un résumé qui traîne sur mon blog. J'avais peur de faire une grosse connerie ou de gêner tout le
monde, j'étais tout crispé et surtout j'avais très chaud. Après 60 départs, je suis maintenant beaucoup plus détendu, plus serein et plus confiant.
DIM : Je suis ton parcours et ton évolution de SimRacer depuis le début de ta carrière mais est-ce que la victoire est le seul but qui te
fait courir aujourd'hui ?
KJEL : Non, au final ce n'est pas (plus) ce que je recherche. Obtenir une victoire ça reste super, un grand moment mais le plaisir est
variable en fonction des conditions pour arriver à ce succès. Lorsque j'ai franchi la ligne d'arrivée en tête pour la première fois, j'ai juste lever le pouce. J'étais tellement concentré à bien
faire les choses que j'ai eu du mal à exprimer ce succès qui a été construit depuis le premier tour.
Par contre, ma deuxième victoire s'est joué dans les trois derniers tours après une arsouille entre trois-quatre pilotes pendant plus de 10 tours. Là, quand j'ai passé le drapeau à
damiers en P1, j'ai explosé ma gorge et sûrement les oreilles de mes voisins. J'étais à bord de la Chevrolet Cruze de Huff sur le circuit Okyama qui m'a d'ailleurs toujours réussi. Je brandissais
mon doigt comme Vettel en criant Yes, yes (rires).
Tout à l'heure, tu parlais d'arsouilles et de bagarre en milieu de peloton entre simracers gentlemen. En effet, j'aime me battre mais pour un top 8 avec de la bagarre et de belles actions mais
j'aime également faire une course propre, sans faute. Par contre, je déteste rouler sans plaisir, sans envie ou très loin des premiers. Je déteste me battre avec la voiture et faire plein de
fautes. Désormais, je choisi mes courses et zappe celles qui ne vont pas me correspondre. Je veux rouler uniquement avec des voitures qui me donnent des sensations et du plaisir !
D'après toi, est-ce que c'est plus facile, ou bien plus difficile qu'avant, de devenir un SimRacer aujourd'hui ? L'accès au matériel est meilleur qu'auparavant mais les jeunes
comme moi, subissent la loi des vieux briscards qui ont des milliers de km et d'expériences dans les pattes.
DIM : Je dirais que c'est largement plus facile de devenir SimRacer aujourd'hui.
Il y a un sacré panel de simulations disponibles maintenant, pour tous les goûts. Les connexions et configurations sont plus faciles à manier que lorsque j'ai commencé. Nous passions plus de
temps sur ces points que sur les pistes autrefois (rires). C'est par contre plus difficile de "briller" pour les raisons que tu invoques et dont je parle un peu plus
haut.
KJEL : Ouais, par contre j'ai l'impression que le circuit a vraiment une place important dans les performances d'un pilote. Si on est à
l'aise sur une piste alors on peut faire de très belles choses mais si on ne comprend pas le tracé, on peut vite se retrouver en fond de grille... Oui, c'est ça, il s'agit vraiment de
compréhension du circuit et je trouve que c'est un facteur clé.
DIM : Oui, avoir un bon feeling avec un circuit est important, c'est un vrai facteur de réussite en course et pour les performances
globales. En fait, pour te dire la vérité, il y a beaucoup de circuits modernes qui ne conviennent pas à mon style de pilotage, les "historiques" avec de grandes courbes sont plus dans
mes compétences. Pour résumer la situation, je n'aime donc pas et j' ai du mal à comprendre la plupart des circuits modernes que je découvre... C'est une chose que j'ai appris au cours de ces
années de pratique, de me forcer à m'améliorer à chaque tours sans me soucier de la performance pure dans un premier temps, sans tenter de me mesurer par rapport aux autres, juste pour moi. Cela
me permet, en plus, d'améliorer mon approche de la conduite sportive. Avec un peu de chance, parfois, le feeling vient et je peux même en arriver à apprécier un tracé qui pourtant ne me parlait
pas plus que cela au départ.
KJEL : Je comprends ce que tu veux dire. Par exemple, j'ai beaucoup de mal avec les courbes de Spa et je ne sais jamais comment aborder ma
trajectoire. En fait, c'est comme pour les voitures... j'ai l'impression qu'il faut trouver le style de circuit qui convient. Je suis plus à l'aise sur un tracé comme Oschersleben qui est moins
fluide et ne possède pas de grandes courbes.
Et d'ailleurs, quelles sont les voitures que tu préfères conduire ? Moi personnellement, j'ai du mal avec les vieilles... (sourire) heu surtout quand il y a beaucoup de chevaux
sous le capot. Ça bouge trop du train arrière et ça part en sucette à la moindre accélération. Si on prend les vieilles Chevrolet ou Camaro, elles ont de la gueule et ça donne envie de les
piloter mais elles ne se laissent pas dompter facilement.
DIM : Contrairement à toi, j'apprécie particulièrement conduire une auto lorsqu'il y a beaucoup de chevaux difficiles à faire passer sur le
train arrière. Les vieilles (autos j'entends...) me conviennent en général et elles me le rendent bien la plupart du temps. C'est d'ailleurs la raison qui explique les affinités que je peux avoir
avec la plupart des monoplaces historiques...
KJEL : Ah moi, je n'aime pas trop les monoplaces... enfin je parle surtout des châssis modernes et pourtant je suis un ancien joueur de
F1 avec tous les Grand Prix de Geoff Crammond à mon actif.
DIM : Les monoplaces modernes sont des châssis que je n'apprécie pas particulièrement non plus, mais malgré tout, j'ai aussi fait de bonnes
courses en F2.0 et en F3 l'an dernier où je finis 3ème du championnat devant quelques Aliens...
KJEL : En fait, je trouve que ça manque de vie, ça ne bouge pas assez, c'est trop collé à la route et le seul plaisir est d'enchaîner les
virages à vitesse grand V.
DIM : Oui, je suis d'accord. C'est encore plus vite, trop pour moi, avec les F1 modernes et l'exploitation du cercle de friction y est
vraiment plus difficile, ça ne pardonne pas l'erreur, quoi. Et toi, il me semble que tu as des affinités particulières avec les tractions ? Pour ma part, ce n'est pas ma tasse de thé
comme l'on dit. Cette proportion à sous-virer ne convient pas du tout à mon style de pilotage.
KJEL : Ah tu fais erreur, je n'aime pas non plus
quand ça sous-vire trop. Mais je déteste encore plus quand ça survire à en perdre le contrôle à chaque virage. En fait, il me faut un juste milieu comme le tourisme. Je préfère les voitures avec
un gabarit petit et disposant d'une cylindrée moyenne, comme les WTCC par exemple. C'est vrai aussi que je suis plus efficace quand je conduis des tractions mais les Porsche Cup sont également
des petits joujoux que j'apprécie.
DIM : Nous nous rejoignons parfaitement sur les Porsche Cup que j'adore aussi.
KJEL : En fait, je pense que c'est important de trouver son style de pilotage et de savoir avec quel type de voiture ça fonctionne le
mieux. Yvan Muller (NDLR, triple champion du monde WTCC) avait dit dans une interview qu'il avait découvert très tôt qu'il n'était pas très bon dans une monoplace et qu'il avait bien
fait de se tourner rapidement vers le tourisme.
DIM : Je ne me permettrais pas de contredire Yvan, d'autant que je pense qu'il a raison (rires). Après, nous avons cette chance, dans le
SimRacing, de pouvoir apprendre et de nous perfectionner autant que l'on veut, et si l'on en a le courage, puisque nous ne sommes pas limités par le budget de roulage. J'ai appris tellement de
choses et je me suis tellement améliorer grâce au SimRacing au cours de toutes ces années de pratique qu'il faudrait au moins 300 entretiens, et je n'exagère pas (!), comme celui-ci pour
consigner tout cela...
KJEL : J'ai une dernière petite question pour clôturer cette interview qui est longue. A mon avis, on a déjà perdu des lecteurs (rires).
Alors, quels sont tes projets futurs pour le blog TheRacingLine ? Il me semble avoir vu un domaine
theracingline.fr qui redirige pour le moment vers ton blog mais peut-être que tu prépares quelques chose de plus gros ?
DIM : Je constate que rien ne t'échappe, comme toujours (sourire)...En fait, je possède le nom de domaine "theracingline.fr" depuis au moins
deux ans maintenant. Je l'avais réservé "au cas où" et avant que d'autres le fassent avant moi. Depuis, j'ai médité la migration du blog vers d'autres technologies et un autre hébergeur car
l'actuel, Over Blog pour ne pas le citer, laisse une marge de manoeuvre assez faible pour qui s'y connaît un tant soit peu en technologies Web.
En résumé, on est très loin de pouvoir faire ce que l'on veut, ce qui freine les orientations que l'on voudrait donner à nos créations. Seulement voilà, notre hébergeur préféré
ne permet pas l'export de nos contenus même si nous en sommes propriétaires. Du coup, pour le moment, et faute de temps, j'en suis resté là, avec une simple redirection sur le nom de domaine
initial. Peut-être que je finirai par reprendre la main sur l'ensemble, mais ce n'est pas pour l'avenir immédiat.
J'ai, moi aussi et puisque l'on parle de cela, une dernière question, cela finira d'achever nos lecteurs qui n'ont que très peu de chances d'en arriver jusque là (rires)... Tu
parles, depuis quelques semaines, de stopper tes activités sur ton blog. Je fais partie, bien sûr, de ceux qui sont attristé par cette
nouvelle... Tu parles aussi de démarrer un autre projet, je suis curieux d'en savoir un peu plus à ce sujet. Je cherche le scoop (rires) !
KJEL : Eh bien j'ai toujours aimé créer et m'investir dans des nouveaux projets. J'ai commencé par concevoir des maps sous le jeu Vietcong,
puis je suis devenu administrateur et modérateur d'un forum et enfin j'ai créé le blog Chez Kjel en 2006, pour suivre à l'époque la
mouvance frénétique des blogs. Depuis, l'Internet a considérablement évolué et j'ai envie de suivre ce changement et de tenter de nouvelles expériences via le web. Comme tu l'as dit, over-blog
nous limite et je veux aller plus loin avec un projet semi-pro.
Rien n'est encore décidé concernant l'avenir du blog Chez Kjel. Au pire, il va rester dans un état végétatif, au mieux, il va y avoir une réorganisation de l'ensemble. J'aime savoir que je
dispose d'un espace où je peux m'exprimer librement sur la toile. Peut-être est-ce cela l'avenir de mon blog avec un peu de F1 et de Simracing ?
Pour finir, je souhaite te dire bravo pour ton blog. Tes lecteurs ne le savent peut-être pas, mais entretenir et maintenir une telle activité demande beaucoup d'efforts, de temps
et de motivation. Quand un commentaire est déposé, c'est alors un réel boost pour le responsable du blog ou l'auteur de l'article. J'espère que tu auras une participation et une implication plus
importante de la part de tes lecteurs et peut-être qu'une petite équipe de rédaction verra le jour avec Dim en chef rédacteur.
DIM : Merci Kjel ! Tu as raison, les interactions que l'on peut avoir avec nos lecteurs sont un facteur de motivation important. C'est aussi
en cela, d'ailleurs, que je te dois beaucoup. Sans tes visites et tes commentaires réguliers de la première heure, qui m'ont encouragé à continuer, je n'aurais sans doute jamais été plus loin que
10 articles et The Racing Line ne serait plus... Si bien que, peut-être un jour, on dira que c'est le SimRacing francophone qui te doit beaucoup (rires)... J'aimerais bien, c'est vrai, monter une
petite équipe de rédaction, avis aux amateurs, cela me permettrait de souffler un peu lorsque la saturation se fait sentir... Et puisque l'on parle de cela, ton contrat est sur mon bureau
!
Oui, j'espère bien que nous pourrons continuer à suivre, sur ton blog, ton parcours de jeune SimRacer, que nous pourrons aussi avoir des nouvelles de la Formule 1 sous le prisme de ton regard
unique sur cette discipline. Quoiqu'il en soit, je te souhaite beaucoup de courage et de réussites dans ce que tu vas entreprendre dans l'avenir.