Un article rédigé par Alain Lefebvre - septembre 2012
Cet été, l’actualité du simracing a été riche et pleine de promesses mais aussi de menaces… Examinons cela ensemble.
Le point d’orgue a été sans conteste le salon "gamescom" qui s’est tenu fin août 2012 à Cologne. Lors de cette manifestation géante, deux éditeurs spécialisés dans le simracing en profitaient pour montrer leur titre phare pour la toute première fois : RaceRoom Experience pour SimBin et Assetto Corsa pour Kunos.
Pour ce qui est de SimBin, l’annonce de RaceRoom Experience est arrivée un peu comme une surprise dans la mesure où tout le monde attendait du nouveau (sans plus trop y croire, pour beaucoup…) au sujet de GTR3. Mais de GTR3, il n’en est plus question (même si, officiellement, le projet n’a jamais été annoncé comme "abandonné", SimBin n’en parle plus et il faudra se contenter de se mutisme qui parle de lui-même, si j’ose dire !).
Revenons rapidement sur ce défunt GTR3… Le projet a avorté non pas sur un problème technique mais bien sûr un problème de licences. En effet, depuis Race07, SimBin n’a plus été capable d’obtenir le type de licence globale nécessaire pour un titre comme GTR3. C'est que, pour représenter le plateau d’une catégorie du championnat GT FIA (au fait, on parle de quelle catégorie au juste ? GT1, GT2 ou GT3 ? Même les pros de ce domaine ont du mal à faire la part des choses et à communiquer efficacement sur leur championnat !), il faut soit une licence globale qu’il faut demander à l’organisateur du championnat (SRO en l’occurrence), soit à chaque constructeur impliqué dans la compétition concernée. Or, depuis quelques années, les constructeurs en question n’acceptent plus que l’organisateur cède ce type de licence aux éditeurs de jeux vidéo (oui, je sais que vous avez tous horreur qu’on appelle ainsi nos belles simulations mais, pour la grande majorité des gens, cela reste encore des "jeux vidéos"…) et il faut donc que l’éditeur en question négocie au cas par cas. Or, on a déjà vu ce que cela donnait dans le cas de GTR Evolution (du même SimBin) où les Porsche et Ferrari étaient absentes du titre pour cause de licence, justement…
Bref, depuis GTR Evolution, la situation sur ce front n’a cessé d’empirer car les éditeurs sont désormais de plus en plus nombreux à réclamer des licences officielles… Ce qui, en conséquence, a fait grimper les prix !
Au bout d’un -long- moment, SimBin a fini par réaliser qu’il était dans une impasse avec GTR3 et a enfin décidé de changer son fusil d’épaule. Cela n’a l’air de rien mais il s’agit bien d’un moment historique : Codemasters est désormais le seul à pouvoir aligner un titre faisant appel à une licence globale avec sa série "F1" annuelle… Oncle Bernie est trop malin (ou a trop de pouvoir) pour laisser les constructeurs s’affranchir de cette contrainte… D’où la possibilité de la revendre ensuite à Codemasters (qui nous l’a fait payer au bout du compte mais c’est une autre histoire).
Donc, SimBin se réinvente enfin en misant sur un "jeu" gratuit (enfin, presque), tentant de reprendre la recette d’iRacing tout en améliorant au passage le mélange en axant justement sur le caractère gratuit et accessible du contenu. Un peu à la manière de World of Tanks, on ne paye que si l’on veut des contenus optionnels… Ça peut marcher et il faut encourager ce genre de démarche plutôt que de la condamner car, objectivement, SimBin n’avait plus le choix : c’était ça ou disparaître. Mais, bien entendu, le succès éventuel n’est pas lié à la démarche mais bien au contenu et, pour le moment, difficile d’en juger car nous avons juste une démo limitée pour nous faire les dents… Et que donne cette démo ?
Honnêtement, pas grand-chose. Non pas que cela soit déjà raté mais plutôt qu’il soit difficile de juger un titre sur si peu. Je reste toutefois optimiste car j’avais eu une bonne surprise avec la version précédente qui s’appelait RaceRoom The Game 2 (la version 1 était très limitée et je ne l’avais même pas testé). Donc, donnons encore un peu de temps à SimBin et espérons qu’une bonne (voir très bonne) surprise sera au rendez-vous.
Et du côté d’Assetto Corsa, qu’est-ce que sa présence à GamesCom a révélé ?
Là encore, il s’agit pour le moment d’une promesse. Mais avouons que la promesse est belle est bien présentée !
La version d’Assetto Corsa montrée à cette occasion était évidemment une pré-alpha qui est loin d’être complètement significative de ce que sera la version finalement commercialisée (oui, je sais, on répète cet avertissement tout le temps mais c’est justement parce que c’est important : il est plus que léger de juger d’un logiciel avant même sa version béta !). Cependant, il est clair que ce qu’on a pu voir est "appétissant" pour ne pas dire plus. Encore mieux, j’aime beaucoup la philosophie de développement affichée par l’équipe de Kunos : voilà des gens qui donnent enfin l’impression d’avoir vraiment compris ce que doit être une simulation moderne destinée au plus grand nombre. Relisez cette dernière phrase car c’est "destinée au plus grand nombre" qui est l’élément important à retenir !
Car, en matière de simulation pointue et -relativement- exclusive, Kunos avait déjà donné avec netKar pro. Cela n’aurait pas de sens de refaire la même chose pour un titre présenté comme accessible à une large audience…
Donc, Assetto Corsa est riche de promesses et semble bourrée de bonnes choses mais il va falloir encore attendre un peu avant de pouvoir le vérifier car le titre ne sera pas disponible (et dans une première version partielle où, par exemple, la gestion de la météo sera absente) avant la fin de cette année. En attendant, il faudra se contenter d’une démo très limitée et sans doute peu significative. Ceci dit, je ne peux m’empêcher d’être -raisonnablement- optimiste sur Assetto Corsa avec les prudences d’usages, bien entendu.
Pour revenir encore sur le sujet des licences, on voit d’ailleurs qu’Assetto Corsa prend plus ou moins le même chemin que PCARS : un panier de licence qui croit au fur et à mesure sans qu’une grande cohérence en soit déduisible mais qui est la marque de l’opportunisme qui règne en ce moment dans ce domaine… Lotus & BMW se retrouve partout alors que Porsche n’est nulle part (à part sur Automaniax qui, pour ses débuts, commence par une controverse avec Slightly Mad Studio… On a déjà vu mieux comme lancement !).
Pour parler d’un titre qui continue sa progression sans faire trop de bruit, faisons maintenant un détour afin de se pencher sur rFactor2. Voilà un titre très attendu dont la béta est disponible depuis des mois et qui devrait enfin aboutir (à être commercialisé) en décembre prochain. Très critiqué lors ses premiers pas, il semble désormais que l’offre soit de plus en plus convaincante. La dernière mod -officielle- en date, la F2 moderne, est très réussie. Moi qui n’aime pas particulièrement les monoplaces modernes, je dois avouer que je me régale à son volant. Le seul nuage noir qui pointe au-dessus de rFactor2, ce sont les mods précisément…
Car, le moins qu’on puisse dire c’est que les mods ne se bousculent pas vraiment sur rFactor2, pour le moment en tout cas. Certes, le programme est encore en béta et évolue sensiblement d’un build à l’autre (par exemple, le drivers pour le SimCom Motion de Frex qui fonctionnait avec le build 90 ne fonctionne plus avec les suivants… Dommage !). Même si cela est vrai, ceci n’explique pas tout. Rappelons que le succès formidable de rFactor1 reposait justement sur l’abondance des mods (qui mirent un peu de temps à arriver : les débuts de rFactor1 aussi furent pénibles…). Or, cette fois, il semble que l’enthousiasme des modders soit plus difficile à obtenir… Pourquoi ?
Certains vont dire que le modèle de pneus -très détaillé- de rFactor 2 induit une difficulté supplémentaire. Un article récent d’un modder connu (Erale avec "Is modding dying", voir à http://modding.erdbeerfeld.com/is-modding-dying/) spéculait négativement sur l’avenir du modding en mettant justement en avant le fait qu’avec les titres à venir, les mods "bon marché", c’était terminé !
Les circuits scannés au laser et les modèles de pneus détaillés seraient en train de "tuer" le modding facile et qu’il ne restera plus que les créations -remarquables- des teams aguerris comme VirtuaLM. Peut-être bien surtout qu’une autre menace est en train de se pointer : les licences, encore une fois !
Dernièrement, c’est l’intervention de Porsche qui a provoqué l’annulation du mod GT3 Cup Series que le team Enduracers venait de terminer (voir à http://www.virtualr.net/endurance-porsche-cup-series-released-called-off). C’est la première fois qu’une grande marque fait ainsi peser une menace légale sur un team connu de modders… Gageons que ce n’est pas la dernière…
Donc, pour résumer, l’été a été riche de promesses comme de menaces. Le paysage du simracing est clairement en train de se redéfinir : les titres avec licence globale vont se raréfier, les titres avec un mixte de contenus gratuits et payants vont se développer et le modding va devenir plus difficile (même si des éditeurs comme Kunos pour Assetto Corsa veulent le faciliter…). Notre domaine est en train de changer mais aussi c’est le signe de son élargissement !
Quand le simracing n’était qu’une activité d’un petit nombre avec peu d’offres commerciales, la liberté la plus complète (et un certain chaos, également !) y régnait. Maintenant que les frontières sont moins nettes et que le simracing intéresse plus de gens, les contraintes apparaissent, normal.
Je voudrais terminer cette chronique par un appel à participation… Comme vous le savez, je suis en train de publier la seconde édition de mon livre sur le simracing (voir à http://www.simracingbook.com/) et j'aurais besoin d'aide sur deux points : un facile et l'autre moins.
Commençons par le facile… J'aurais besoin de trouver quelqu'un afin de gérer la page des liens du site du livre à http://www.simracingbook.com/les-references-du-monde-du-simracing/
C'est trop chronophage pour que je puisse le faire seul et c'est pour cela que je serais heureux de déléguer cette partie (ou de pointer vers un autre site, je suis ouvert aux suggestions). Plus dur, la version anglaise du livre...
Avec la seconde édition du livre, j'avais pour ambition de proposer une version en anglais du titre. Mais, force est de constater que cette version anglaise avance trop lentement (alors que j'arrive à tenir les rythme des mises à jours de la version en français par ailleurs). Donc, là aussi, j'ai besoin de volontaires pour faire avancer cette traduction plus vite… Si vous êtes intéressé par l'une ou l'autre de ces importantes tâches, merci de m'écrire à simracingbook@gmail.com.