Un article rédigé par Alain Lefebvre - octobre 2012
Alors, c’est déjà la troisième version du jeu F1 de Codemasters et, si on en croit les forums ça et là, cette fois, ça vaut vraiment le coup !
Aha, voyons cela…
J’avais acheté la version 2010 mais je m’étais abstenu pour la version 2011. Voyons déjà ce que j’en disais à l’époque :
Codemasters joue à fond sur l’immersion en faisant en sorte que l’ambiance soit présente (et bien restituée, pour autant que je puisse en juger) partout où c’est possible, bien vu !
Bon, OK, c’est beau et immersif, mais au volant, ça donne quoi ?
En fait, là encore, ça dépend… Ça dépend du temps que vous y passez, des efforts que vous y mettez et de ce que vous attendiez… Je m’explique : mon tout premier contact sur la piste au volant
avec F1 2010 a été affreux, une grande déception car je n’avais aucune sensation !
Le défilement était lent (FPS très bas), le son était décalé (changement de vitesse restitué en retard !), la vision cockpit beaucoup trop basse et les couleurs trop fades. J’ai failli ranger la
boîte avec "daube moisie sans aucun intérêt" comme verdict. Mais, par curiosité, j’ai lu ce qui se disait sur les forums et là, j’ai compris qu’il fallait un peu creuser avant d’abandonner…
J’y ai passé un peu de temps et j’ai trouvé des réglages adéquats : les FPS sont enfin corrects, les couleurs sont corrigées (on n’a plus ce ciel "couleur pollution" au-dessus de la tête… Les
développeurs de Codemasters sont situés à Birmingham, l’ambiance locale a dû les influencer plus que de raison !) grâce aux mods disponibles sur le net, le son est synchrone et j’utilise la vue
TV qui permet aussi de voir les rétros… Et, avec tout cela, ça change tout, vraiment. En fait, la version PC de F1 2010 est terriblement sensible à vos réglages et à vos choix. En fonction de ce
que vous choisirez, vous aurez un bon affichage, un son plus que valable (extra en fait les effets de réverbération dans le tunnel de Monaco !) et des bugs qui se font discrets ou, au contraire,
un truc injouable et super-buggé !
Voilà pourquoi il faut y passer du temps et essayer divers réglages avant de tout jeter. C’est inutile que j’indique quels sont MES choix car je suis persuadé que le résultat dépend aussi
largement de votre configuration… Combinatoire classique du délicat mélange d’un logiciel sophistiqué avec des matériels très divers. Mais, clairement, quelques essais erreurs font toute la
différence, croyez-moi !
Du coup, je n’ai pas encore constaté les nombreux bugs relatés ça et là : pas de pneus qui crèvent pour un oui ou pour un non, pas de retenue interminable dans les stands et ainsi de suite… Je ne
dis pas que ces bugs n’existent pas, je dis simplement que, pour le moment, je ne les ai pas rencontrés (et j’ai passé assez d’heures pour avoir une expérience significative selon moi).
Bon, revenons à la question centrale : le feeling au volant, c’est top ou c’est bof ?
En fait, c’est un peu entre les deux : la voiture n’est pas "sur des rails" comme une arcade comme j’ai pu le lire quelquefois… Par exemple, les aides de type ABS ou antipatinage sont inutiles,
même sous la pluie, c’est dire. Mais cela ne veut pas dire pour autant que c’est "super-facile"… Là encore, une explication s’impose : si vous n’attaquez pas et que vous connaissez à peu près le
circuit, alors vous pouvez enchaîner des dizaines de tours sans mettre un pneu dans l’herbe tout en pensant à autre chose (situation tout à fait improbable avec iRacing par exemple !). En
revanche, si vous voulez aller chercher un bon chrono, c’est une autre paire de manche et il va falloir vous cracher dans les mains !
Et là, c’est tout de suite nettement moins facile. Ceux qui disent que la voiture décroche sans être rattrapable exagèrent : c’est vif mais ça reste gérable. Donc, on se retrouve avec un
"gameplay" bien équilibré : facile si on se contente de rouler, difficile si on veut être et rester devant !
Les dépassements par exemple, sont difficiles mais c’est bien parce que c’est comme cela en F1 : il y a peu d’occasions (même si celui qui est devant est vraiment plus lent) et il faut 1) ne pas
les louper 2) bien viser !
Mais alors, c’est la simulation de l’année ?
Non parce que, d’une part ce n’est pas vraiment une simulation (je vais y revenir) et, d’autre part, parce qu’il y a tout de même, selon moi, quelques défauts gênants :
- on ne voit rien dans les rétros.
- le son est le même pour tous les moteurs (un détail ? c’est à chacun de juger…).
- les circuits modernes sont horribles… Attention, sur ce dernier point, c’est la réalité que je juge, pas le travail de Codemasters !
Les tracés "non-traditionnels" sont -tous- des mauvaises plaisanteries qui font que même Montréal et Monza deviennent des circuits intéressants (laissons Spa de côté car qui sait combien de temps
un pareil joyau va rester intact… Quand on voit déjà comment ils s’acharnent à remanier la dernière chicane, tout est à craindre !), c’est vraiment terrible !
De même, je ne suis pas du tout fan du règlement actuel de la F1 moderne avec cette obligation de changer de pneus en cours d’épreuve… Ça donne un déroulement haché et difficile à comprendre,
même vécu de l’intérieur, c’est dire !
Les bugs ou les compromis surprenants (comme les temps des IA pendant les essais) ne sont pas niés par l’équipe de développement de Codemasters qui promet un patch pour bientôt et c’est mieux que
rien. De plus, les moddeurs ont commencé à travailler et les premiers résultats sont encourageants puisque les défauts d’affichages sont presque tous corrigés grâce à eux…
Ceci dit, les courses sont très prenantes et on n’a pas le temps de s’ennuyer. Votre ingénieur de piste est omniprésent à la radio et même si c’est parfois un peu répétitif, ses indications sont
quelquefois bien utiles (et ça aussi renforce l’immersion). En fait, c’est là la clé de F1 2010 : plus on y joue et plus on apprécie.
OK, merci pour le rappel. Donc, on peut juger ce titre de deux façons : soit par rapport à son évolution (et là, la version 2010 est mon point de référence), soit comme si on le découvrait. On va
faire les deux !
Bien entendu, je n’évoque ici que la version PC (aussi bien pour F1 2010 que pour F1 2012). J'ai commencé par récupérer la démo de F1 2012 et je n’ai pas été formidablement impressionné : pas de
feeling au volant, "test des jeunes pilotes" sans intérêt et de nombreux "retours au bureau" qui indiquent clairement un manque de stabilité du programme… Normalement, l’expérience aurait dû
s’arrêter là. Mais les témoignages des forums indiquaient qu’il ne fallait pas tenir compte de la démo et que la version complète était bien mieux… Bon, admettons.
Honnêtement, la version 2012 semble mieux finit que la 2010 puisque je n’ai pas eu besoin de la patcher dans tous les sens pour la rendre utilisable ce qui est le moins qu’on puisse attendre d’un
produit dont la vocation est la large diffusion. Cependant, il ne faut pas hésiter à passer du temps sur le réglage du volant qui est vraiment un point clé. J’ai tout de même ajouté une mod :
celle qui permet d’avoir une petite vibration dans le volant au passage des vitesses, un plus vraiment sympa que je n’avais pas vu dans un jeu automobile depuis 1998 !
Les graphismes sont beaux mais, désormais, avec PCARS, on s’est habitué et ce niveau et ce n’est plus la même "claque" que lors de la sortie de la version 2010. Sur le plan graphique d’ailleurs,
ce qui est bien réussi, c’est le bord des tracés : c’est rarement désert car, effectivement, lors des grands prix de F1, il y a du monde et de l’animation. Avec le titre de Codemasters, cela est
très bien rendu sans pour autant tomber dans le grand n’importe quoi qu’on a pu voir avec Shift première version (où l’ambiance des bords de piste faisait penser à une fête foraine !).
En revanche, je note une régression des effets graphique sous la pluie… Avec F1 2010, c'était carrément époustouflant de réalisme : le spray montait et descendait en fonction de la vitesse et du
nombre de voiture devant vous et je peux dire (pour l’avoir vécu lors de ma toute première course en monoplace) que c’est tout à fait ça !
Cette fois, avec la version 2012, la vue est brouillée par l’intensité des gouttelettes mais l’effet spray est moins bien rendu (selon moi), dommage…
Et le ressenti au volant, des progrès ?
Hum, en fait, pas vraiment… Le force feedback est vraiment pauvre : il faut vraiment monter sur les vibreurs pour sentir quelque chose et c’est tout. Je dirais même que le comportement est en
régression par rapport à la version 2010 dans la mesure où, quand la voiture commence à partir en vrille, il n’y a rien à faire pour la rattraper et c’est assez frustrant.
De plus, le comportement de la voiture est assez déroutant : le sous-virage semble permanent et je n’ai pas réussi à l’enrayer même en utilisant toutes les ressources des réglages. Au final,
j’obtiens toujours la même chose : une voiture "longue" au freinage (d’ailleurs, je trouve que le freinage n’est pas aussi agressif qu’il le devrait, même en mettant la pression au maxi et des
gros disques… bizarre). D’ailleurs on aimerait bien que l’ingénieur de piste soit aussi bavard sur les réglages qu’il l’est pendant qu’on tourne… Mais là, bizarre, il reste muet comme une carpe !
Tiens, puisqu’on parle des sons, ces derniers sont vraiment à la hauteur (c’était déjà le cas de F1 2010 mais c’est encore un cran au-dessus maintenant) : on entend même le bruit du DRS quand il
s’ouvre ou se ferme. Le bruit du vent et des turbulences est également bien rendu et tout cela renforce l’immersion, bravo (on sous-estime toujours le rôle du son dans l’immersion mais, quand
c’est bien fait, on se rend compte que cela participe beaucoup).
En revanche, le gameplay est toujours aussi prenant : pas le temps de s’ennuyer pendant les courses, il y a toujours quelque chose à faire !
Les adversaires (IA) ne sont pas trop agressifs mais ils attendent le bon moment pour vous chiper une position : à la moindre erreur, au moindre élargissement, boum, vous avez perdu une ou deux
places… Ah, il ne faut vraiment rien lâcher pour faire un résultat !
De plus, les F1 de la saison 2012 demandent vraiment beaucoup de travail au volant : il faut gérer l’emploi du KERS et du DRS car ces deux dispositifs font vraiment la différence (on le voit dans
les temps au tour aux essais).
Alors, le bilan ?
Mitigé en fait. Oui, le gameplay est bien équilibré, oui l’ambiance est bien présente et les effets graphiques sont bons mais le comportement de la voiture est loin d’être enthousiasmant et les
réactions aux réglages laissent à désirer. Donc, on ne s’ennuie pas en course (un point important tout de même) mais on ne prend pas de plaisir au volant car la voiture semble "déconnectée" (j’ai
pas de meilleur terme à proposer car ici, on est forcément un peu flou : le ressenti est quelque chose de très subjectif). En revanche, je peux être tranché sur un point : j’aime vraiment pas ce
que la F1 est devenue, ça c’est clair !
Et ce jeu permet de s’en rendre compte "de l’intérieur" si j’ose dire. Les règles sont de plus en plus artificielles et F1 2012 ne semble en oublier aucune. Les pénalités pleuvent pour un oui ou
pour un non alors que je pensais être plutôt un pilote "propre"…
Le fait qu’il soit obligatoire de s’arrêter pour changer de pneus est débile selon moi. Tout comme les contraintes qui régissent l’emploi du DRS (si on veut absolument mettre à disposition des
pilotes un bouton "push to pass", il suffit que ce dernier soit limité en nb d’usage et c’est tout). Bref, ce jeu ne pourra plaire qu’à ceux qui adorent la F1 actuelle mais je ne fais clairement
pas partie de ces fans !
Par rapport à F1 2010, oui, F1 2012 est en progrès sur quelques points importants mais cela justifie-t-il les 40 euros demandés ?
Selon moi, non. Il serait plus juste de proposer une mise à jour pour ceux qui détiennent déjà la ou les précédentes versions… Ce serait aussi une récompense à la fidélité, justifiée cette
fois.
Et si on ne compare pas F1 2012 à ses ancêtres mais aux autres jeux (simulations y compris) ?
Dans ce cas, la réponse est variable : F1 2012 est bien accessible et fun qu’iRacing par exemple mais bien moins fidèle aussi. Pour ne prendre que Spa, le tracé proposé par iRacing semble bien
plus "vivant" et avec un relief bien plus marqué (et donc intéressant). J’ai trouvé que le Spa de F1 2012 était bien plat et morne. Donc, pour le plus grand nombre, F1 2012 est un meilleur
investissement qu’iRacing, surtout pour ceux qui veulent simplement s’amuser sans devoir y passer des heures avant de pouvoir mettre un pied devant l’autre…
Par contre, si on compare à rFactor2, Codemasters devrait réviser largement sa copie !
OK, rFactor2 n'est pas encore terminé mais nombreux sont ceux qui pensent que c’est également le cas du titre de Codemasters…
Déjà, sur rFactor2, on a un FFB qui vous communique vraiment ce qui se passe avec la voiture. Les "Formula Masters" d’ISI ne sont pas aussi belles, détaillées et nombreuses que les F1 de Cody
mais elles au moins ont un comportement qui se comprend… Là au moins, on peut rattraper une glissade (que ce soit à basse ou haute vitesse). En tournant longuement à Sepang avec ses fameuses
Formula Masters, j’ai pu me rendre compte que, sur bien des points, rFactor2 est très supérieur à F1 2012. Reste que les courses (avec les IA) sont moins serrées, moins disputées et donc moins
prenantes quelque part (encore que sur le point précis des IA, rFactor2 est en gros progrès par rapport à rFactor1 et même au-dessus de GSC 2012, la référence actuelle en la matière).
D’autant que je me suis rendu compte (un peu par hasard : en me faisant doubler dans les grandes lignes droites de Sepang !) que le DRS était simulé dans rFactor2… Avec le mod Formula Masters,
cela s’appelle "Rear Flap System" et on peut programmer le bouton pour (le KERS est aussi géré parait-il mais là, je serais moins affirmatif).
Bref, si on devait choisir entre F1 2012 et rFactor2, il est clair que le titre de Codemasters ne fait pas le poids selon moi : rFactor est très accessible car la finesse de pilotage rend ce
dernier relativement facile à maîtriser (une alchimie qu’iRacing peine toujours à reproduire, hélas). Le contenu purement "F1" est moins riche, c’est entendu mais le potentiel en dehors de la F1
(par exemple : le mod F2 FIA qui est vraiment formidable sans même évoquer les F1 des années 60…) est sans commune mesure.
En conclusion, on peut rester à l’écart de ce titre sans avoir l’impression de passer à côté de la simulation de l’année car ce n’est vraiment pas le cas. En revanche, on peut se demander
pourquoi nos éditeurs de simulation ne prennent pas quelques leçons du côté de Birmingham : les à-côtés de la course restent toujours tristes comme un jour sans pain, pas la moindre célébration
quand on gagne une course (il n’y a que SimBin qui ait compris cela), pas la moindre liaison radio avec le pilote (sauf dans iRacing où le spotter fait bien son boulot) et ainsi de suite.
Oui, nos simulations gagneraient beaucoup à s’égayer un peu et c’est bien cela que le succès de la série "F1" de Codemasters nous apprend.
Images : www.guardian.co.uk
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